Lors du Sommet sur l’intelligence artificielle qui s’est déroulé à Paris, une annonce phare a été faite : un investissement massif de 109 milliards d’euros, en grande partie d’origine privée, pour soutenir le développement des infrastructures françaises en IA. Cette initiative a suscité de vives réactions. Parallèlement, un projet moins médiatisé pourrait influencer profondément le futur des technologies d’IA. Un groupe de pays, d’organisations et de grandes entreprises a révélé le lancement de « Current AI », une initiative visant à collecter 2,5 milliards de dollars pour concevoir une IA orientée vers le bien commun.
Cette démarche s’inscrit dans une stratégie défendue par la France, qui a perturbé les marchés financiers suite à l’introduction de l’IA chinoise DeepSeek. On assiste à un engouement pour les IA open source, accessibles et modifiables sans frais ni restrictions de droits. Bien que ce modèle semble éloigné des logiques de profit, il reçoit un large soutien, y compris du président Emmanuel Macron. Quels sont les attraits de ce modèle pour la communauté de l’IA en France ? Quels en sont les bénéfices et les préoccupations associées ? Voici quelques clés pour comprendre.
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Promouvoir le partage des connaissances
Dans le domaine de l’IA, la diffusion libre de savoirs n’est pas une nouveauté. Par exemple, en 2017, Google a rendu publiques les spécifications d’une architecture d’IA, « Transformer », ce qui a été déterminant pour l’essor du secteur. Sur la plateforme Hugging Face, plus d’un million de composants d’IA sont partagés par leurs auteurs. Pourtant, certains leaders, comme OpenAI, ont progressivement renoncé à cette transparence, invoquant des risques liés à la puissance de leurs IA. Le partage ouvert est pourtant vu par ses partisans comme une voie essentielle pour maximiser les bénéfices collectifs de l’IA.
Les avancées en libre accès pourraient contribuer à réduire les disparités numériques croissantes. Les secteurs de la santé, de l’agriculture ou de l’industrie sont autant de domaines où l’IA peut avoir un impact positif. La France soutient depuis longtemps la recherche open source, notamment via l’utilisation du supercalculateur Jean-Zay par les chercheurs. Cette philosophie est au cœur de l’initiative diplomatique française en matière d’IA.
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Un levier économique et concurrentiel
L’initiative « Current AI » vise également à diversifier le marché de l’IA, selon l’Élysée. En rendant les IA accessibles et modifiables, les entreprises peuvent les personnaliser sans dépendre d’un petit nombre de géants du secteur. « Avec une approche ouverte, il est possible de mobiliser une vaste communauté de développeurs, » expliquait Guillaume Avrin, responsable de la stratégie nationale pour l’IA. Cette ouverture est perçue comme une opportunité pour les acteurs émergents de se démarquer.
« Current AI » prévoit de financer le développement d’éléments d’IA, tels que des architectures et des bibliothèques, pour permettre à chacun de créer ses propres applications. Des projets de recherche, des systèmes d’audit et l’élaboration de bonnes pratiques pour minimiser les risques figurent également parmi les objectifs. Bien que les détails des projets financés restent à préciser, l’initiative suscite déjà un vif intérêt.
Transparence et responsabilité
De nombreux acteurs de l’IA en France soutiennent cette ouverture. « Partager les recherches accélère le développement et l’implémentation en entreprise, » affirme Florian Douetteau de Dataiku. Toutefois, des voix s’élèvent pour alerter sur le « open washing » : certaines entreprises prétendent adopter l’open source sans divulguer les données d’entraînement de leurs modèles. Cela va à l’encontre des principes de l’open source définis par l’Open Source Initiative.
La transparence est cruciale pour évaluer les biais et les usages potentiellement dangereux des IA. Néanmoins, sans un encadrement adéquat, les logiciels open source peuvent aussi être détournés à des fins malveillantes.
Préoccupations environnementales et sociétales
Certains redoutent que l’impact environnemental de l’IA ne s’aggrave. Bien que l’open source facilite le partage de solutions énergétiques, l’adoption généralisée de l’IA pourrait entraîner une hausse de la consommation énergétique globale. Des inquiétudes émergent également quant aux IA surpuissantes et leurs possibles conséquences sociétales, allant du remplacement des travailleurs à des menaces existentielles.
Maxime Fournes, de l’association Pause IA, plaide pour une coordination internationale afin de fixer des limites pour éviter des risques catastrophiques. L’open source représente-t-il une chance ou une menace ? Stella Biderman estime qu’il est crucial d’évaluer chaque situation individuellement.